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LE SCORPION LANGUEDOCIEN

Toine résiste à la piqûre du Scorpion, non comme Cétoine, mais comme ver, degré préparatoire d’un état supérieur. Alors toutes les larves, qui plus, qui moins, d’après leur robuslicité, doivent posséder semblable résistance.

À ce sujet, que dit l’expérimentation ? Il convient d’écarter de l’épreuve les vers débiles, de complexion délicate. Pour eux, la simple piqûre, sans le concours du venin, serait blessure sérieuse, bien des fois mortelle. La pointe d’une aiquille les mettrait à mal. Que sera-ce du brutal slylet, même non empoisonné ? Il faut ici des corpulents, que la panse trouée n’émotionne guère.

Je suis servi à souhait. Une vieille souche d’olivier, ramollie sous terre par la pourriture, me vaut la larve de l’Orycte nasicorne. C’est une andouillette dodue, de la grosseur du pouce. Piqué par le Scorpion, le ver bedonnant se glisse parmi les morceaux d’olivier pourri dont j’ai garni un bocal ; insoucieux de sa mésaventure, il travaille si bien des mâchoires que, huit mois plus tard, en pleine prospérité d’embonpoint, il se prépare la niche de la métamorphose. Il est sorti indemne de la terrible épreuve.

Quant à l’insecte adulte, on a déjà vu comment il se comporte. Piqué à la face supérieure du ventre, sous les élytres soulevées, le colosse bientôt chavire et mollement gigote, les pattes en l’air. En trois ou quatre jours au plus, tout mouvement a cessé. Le puissant meurt ; son ver ne perd rien comme vigueur et comme appétit.

Ce succès de mes prévisions est accompagné de bien d’autres. Devant ma porte sont deux vieux lauriers-cerises, superbes de verdure en toute saison. Un Capricorne