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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

trimbaleur de pilules, se démène en une sorte de danse de Saint-Guy. Au contraire, le lourd Orycte, la paresseuse Céloine, amie de longs sommeils au cœur des roses, prennent leur mal en patience, et mollement gigotent des jours entiers avant de trépasser. Au-dessous d’eux se range l’Acridien, le Criquet, le rustique par excellence. Plus bas encore vient la Scolopendre, créature inférieure, d’organisation fruste. Il est ainsi d’évidence que l’action du venin, plus rapide ou plus lente, est surbordonnée à la nervosité du patient.

Considérons à part les insectes d’ordre supérieur, soumis à des transformations complètes. Le terme de métamorphose qu’on leur applique signifie changement de forme. Or n’y a-t-il que la forme de changée lorsque la chenille se fait papillon, lorsque le ver du terreau devient Cétoine ? Il y a plus et bien mieux, nous dit le dard du Scorpion.

Une profonde rénovation se fait dans la statique vitale du métamorphosé ; la substance, en réalité toujours la même, entre en fusion, affine son édifice atomique et devient apte à des frémissements sensitifs qui sont le plus bel apanage de l’insecte nubile. Cuirasse des élytres, feuillets, pompons, tiges vibrantes des antennes, pattes pour la course, ailes pour l’essor, tout cela est superbe, et tout cela n’est rien.

Bien au-dessus de cet outillage domine autre chose. Le transformé vient d’acquérir vie nouvelle, plus active, plus riche de sensations. Une seconde naissance s’est faite qui a tout rénové, dans l’ordre de l’invisible et de l’intangible encore plus que dans l’ordre du matériel. C’est mieux qu’une retouche dans les arrangements moléculaires, c’est l’éclosion d’aptitudes ignorées du