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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

sant la région des yeux à découvert. Il ne faut pas éborgner la porteuse : la sécurité générale l’exige. Ils le savent et respectent les lentilles oculaires, si populeuse que soit l’assemblée. Toute la bête se couvre d’un tapis de marmille, sauf les pattes, qui doivent conserver leur liberté de mouvements, et le dessous du corps, où sont à craindre les frottements du terrain.

À la surchargée, mon pinceau impose une troisième famille, pacifiquement acceptée elle aussi. On se serre un peu plus, on se superpose par strates, et tout le monde trouve place. La Lycose n’a plus alors figure de bête ; c’est un hérissement sans nom qui déambule. Les chutes sont fréquentes, suivies de continuelles ascensions.

Je m’aperçois que j’ai atteint, non les limites du bon vouloir de la porteuse, mais celles de l’équilibre. L’Araignée adopterait indéfiniment d’autres enfants trouvés, si l’échine lui permettait de leur donner position stable. Tenons-nous-en là. Rendons à chaque mère sa famille en puisant au hasard dans l’ensemble. Il y aura forcément des échanges, mais cela ne tire pas à conséquence : fils réels ou fils adoptifs sont même chose aux yeux de la Lycose.

On désirerait savoir si, loin de mes artifices, dans des circonstances où je n’interviens pas, la débonnaire éducatrice se charge parfois d’un supplément de famille ; on tiendrait à savoir aussi ce que devient cette association du légitime et de l’étranger. Pour la réponse à la double question, je suis on ne peut mieux servi.

J’ai établi sous la même cloche deux vieilles matrones chargées de petits. Chacune a sa demeure éloignée de celle de l’autre autant que le permet l’ampleur