Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/110

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conquis par les Barbares ; il a été recouvert par les Barbares. Il n’y a pas à parler ici d’ensommeillement, ni même de dégénérescence.

On pourrait parler d’anarchie, oui ; pendant certaines périodes les soldats disposèrent du pouvoir et le donnaient les uns à un général, les autres à un autre, et opposaient l’un à l’autre les hommes de leur choix ; c’est de l’anarchie ; mais ce n’est pas de l’énervement ; l’âpreté même avec laquelle se battaient ces hommes les uns contre les autres pour se disputer l’empire, prouve qu’ils n’étaient ni endormis ni amollis. La paix ne paralyse point. Elle met en jeu seulement les éléments sains et purs de l’activité humaine, en laissant les autres inactifs et en les annihilant peu à peu par ne leur donner point de matière. Elle est, même aux yeux de ceux pour qui le travail et l’effort constant sont l’idéal, l’état normal de l’humanité.

Ce que la guerre a de plus dangereux parce que c’est ce qu’elle a de plus corrupteur, c’est la paix avant et après allé, c’est la paix armée, c’est le militarisme en temps de paix. Le militarisme en temps de guerre a peut-être sa grandeur. Il développe, parce qu’il les exige, le courage, le sang-froid, la patience, la ténacité, l’abnégation, l’héroïsme ; mais le militarisme en temps de paix est une triste école de démoralisa-