Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/25

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Il est à remarquer que les sages de la Renaissance, s’ils ont tous maudit les guerres religieuses, ce qui est assez naturel et ce que je ne songe probablement pas à leur reprocher, ne se sont guère prononcés formellement contre la guerre elle-même. Peut-être sont-ils trop disciples de cette antiquité où il est incontestable que la guerre était surtout en honneur. Rabelais et Montaigne, que M. Lagorgette appelle à son secours, rendent peu. On ne peut pas considérer comme condamnation philosophique de la guerre le chapitre où est raillée la monomanie conquérante de Picrochole, ni le chapitre où Rabelais recommande, non point de ne pas conquérir, mais de conquérir avec douceur, bienveillance et charité à l’égard des vaincus (Pantagruel, iii, 1). M. Lagorgette a une tendance à voir du pacifisme partout où il n’y a point de férocité ; c’est un peu forcer les textes.

De même Montaigne, qui a tout dit et dans tous les sens, a pu écrire et il a écrit : « Quant à la guerre qui est la plus grande et pompeuse des actions humaines, je ne saurais volontiers si nous nous en voulons servir pour argument de quelque prérogative, ou, au rebours, pour témoignage de notre imbécillité et imperfection, comme de vrai la science de nous entre-défaire et entre-tuer et ruiner et perdre notre propre espèce, il semble