Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/124

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table surtout parce qu’il laisse Dieu en dehors du mal, quelque grand que soit celui-ci dans le monde que nous voyons.

Ne craignez pas et ne détestez pas ce qui limite Dieu, que ce soit la nécessité ou que ce soit des dieux inférieurs à lui. Ce qui limite Dieu le justifie, et il ne peut être justifié qu’à la condition d’avoir sa borne. Il n’y a que trois moyens de justifier Dieu. C’est de le représenter comme faisant du monde un lieu d’épreuves pour l’homme et permettant le mal comme une matière à exercer la vertu humaine ; et ce sera la solution du Christianisme ; — c’est de le représenter comme incomplètement puissant et comme combattu par une puissance contraire ; — ou c’est de le nier. C’est le second de ces moyens que Platon a pris, ne voulant ni renoncer à Dieu ni admettre un Dieu que la morale humaine pût accuser, condamner et par conséquent rejeter. Si la morale a besoin de Dieu, il ne faut pas en imaginer un qui la trouble, et Dieu a besoin d’être moral précisément dans la mesure où la morale a besoin de lui.

Ce Dieu, Platon veut non seulement qu’il soit bon, ab initio, bon comme créateur ou ordonnateur du monde, et qu’il ait formé le monde par bonté, mais qu’il continue à être bon, c’est-à-dire qu’il soit providentiel. Comme nous l’avons déjà indiqué,