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POUR QU’ON LISE PLATON

beautés d’ici-bas et de s’élever jusqu’à la beauté suprême, en passant pour ainsi dire par tous les degrés de l’échelle, des beaux corps aux belles occupations, des belles occupations aux belles sciences, jusqu’à ce que de science en science on s’élève à la science par excellence qui n’est que la science du beau lui-même. Si quelque chose donne du prix à cette vie c’est la contemplation de la beauté absolue… »

Cette théorie de Platon sur l’amour, je parle de cette dernière, de celle qui considère l’amour comme une initiation au culte du beau en général et enfin du beau en soi, a infiniment séduit les poètes et elle a comme rempli de ses échos, on le sait, des époques littéraires tout entières.

Elle est excessivement faible en soi, aussi faible en soi qu’incomparablement brillante par l’expression, et c’est du reste une des habitudes de Platon de n’être jamais plus exquis comme artiste que quand il est médiocre comme philosophe. Au fond elle ne signifie rien, n’y ayant aucune raison pour qu’on généralise un sentiment. On généralise une idée, et c’est même une des tendances incoercibles de l’esprit humain, et de ce qu’on aura vu que beaucoup de choses sont les effets de la chaleur, on dira que tout vient du feu ; les Grecs connaissent assez cela. Mais il n’y a aucune néces-