Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
225
POUR QU’ON LISE PLATON

guide qui vous avertit de la connaissance que vous désirez atteindre, de celle que vous avez marquée par trop de précipitation, de celle qui est illusoire et de celle qui est solide.

Excitateur, modérateur et redresseur ; mais non jamais entraîneur et homme qui emporte les hommes à sa suite par l’éloquence et qui les tire derrière lui par l’autorité, voilà ce que l’éducateur doit être.

Tel fut Socrate, avec cette réserve que peut-être il était trop ironiste et taquin et prenait dans son rôle d’éducateur ou dans son attitude de questionneur ignorant surtout un prétexte à se moquer des hommes. Platon, à mesure qu’il parle en son nom et aussi qu’il approche du terme, quitte ce ton complètement. Il observe et presqu’il affecte une grande courtoisie et presque un ton de respect à l’égard de ses interlocuteurs. De la méthode qui fut évidemment celle de Socrate, il n’a gardé que le fond : exciter et diriger par des questions adroitement posées et faire trouver ainsi au disciple la connaissance ou lui persuader qu’il l’a trouvée lui-même. Socrate était le suggestionneur qui aime à troubler et confondre ; Platon, ou l’éducateur qu’il institue, est le suggestionneur qui aime à amener le disciple à une idée nette, atteinte de telle façon qu’il soit reconnaissant et à lui-même et à son guide de l’avoir atteinte.