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POUR QU’ON LISE PLATON

leur fibre sensible et prendre un bon chemin pour les étonner et les faire se récrier.

Ensuite, comme tout aristocrate de ce temps-là, Platon est un Athénien qui a les yeux fixés sur Lacédémone, sinon tout à fait comme sur un modèle, du moins comme sur quelque chose qu’on ne ferait pas mal d’étudier et dont on aurait quelque profit à prendre quelques traits ; et si les œuvres de Platon sont une imitation de Socrate, ils ne laissent pas assez souvent d’être une imitation de Sparte.

Ensuite, très persuadé que l’on tombe toujours du côté où l’on penche, Platon ne pouvait que vouloir apporter un contrepoids aux tendances et penchants les plus forts et assez dangereux des Athéniens ; et à ce peuple trop artiste et pour qui une belle œuvre d’art avait toujours raison et était une valeur incommensurable avec toute autre valeur, dire avec fermeté et persistance que l’art est très vain et de nul prix en lui-même et ne vaut que mettant sa fin en dehors de lui et au-dessus, c’était apporter le contrepoids jugé nécessaire et remettre les esprits, tout compte fait, en un juste équilibre.

Et enfin c’était là une doctrine en harmonie avec les autres idées de Platon. Cette « Circé des philosophes », entendez la morale, a de très bonne heure