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POUR QU’ON LISE PLATON

des aspects de la morale et que la morale est l’art suprême, ou encore l’art total.

Ces arts faux, nous avons tendance à les appeler des « routines », d’abord pour les distinguer des arts vrais et pour ne pas leur donner ce nom honorable ; ensuite parce que c’est une marque à les distinguer, non pas très sûre, mais très souvent juste, qu’ils sont des collections de procédés qu’on se transmet, plutôt qu’ils ne sont des choses d’inspiration. Ce n’est qu’un signe ; mais c’est un signe. Le véritable artiste n’imite pas, ne travaille pas par procédés. Il a les yeux fixés sur sa pensée intérieure, laquelle s’est formée d’abord par contemplation des objets naturels, puis par méditation ; et cela lui est nécessaire et suffisant. Le faux artiste imite toujours, emprunte toujours. Il s’assimile le procédé courant et il s’y tient avec une parfaite fidélité. Le cuisinier fait tout de même, et le sophiste et le politicien. Le cuisinier sait la sauce qui est en possession de plaire ; il en a la recette et il applique cette recette. Le sophiste ou le politicien, car ces personnages se confondent, connaissent les cinq ou six lieux communs, soutenus de trois ou quatre oracles, qui plaisent au peuple et ils les servent sans cesse, avec de simples variations de forme et pour ainsi dire d’accommodement.