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POUR QU’ON LISE PLATON

rale, en tout cas des aspects de la morale : voilà ce qu’il faut retenir.

S’il en est ainsi, le principe, en ce qui regarde tous les arts, sera celui-ci. Il ne faut pas faire du bon — ce qu’on appelle bon — en vue de l’agréable ; il faut faire de l’agréable en vue du bon. Le bon n’est pas l’agréable ; car l’agréable est momentané et le bon est permanent. L’agréable est mêlé de désagréable, toujours, et le bon n’est pas mêlé de mauvais. Le bon, c’est l’ordre, c’est l’harmonie d’une âme bien faite ou qui s’est bien faite. L’art doit tendre par l’agréable à l’ordre et à l’harmonie de l’âme, c’est-à-dire au bien de l’âme.

Remarquez que quand l’art croit que son objet est l’agréable, il ne se trompe point au fond et en dernière analyse ; il ne se trompe que de degré ; car à un certain moment le bon et l’agréable se confondent parfaitement. Le bon est agréable et plus agréable que l’agréable sans le bon. Par conséquent, l’art en tendant au bien tend à l’agréable en définitive et donc il se ne trompe pas en croyant qu’il a l’agréable pour objet. Il se trompe en croyant qu’il a l’agréable pour premier objet et prochain et unique. Ce n’est pas cela. Il a l’agréable pour moyen et aussi pour dernier objet confondu avec le bien. Par l’agréable, il doit tendre au bien, et quand il a atteint le bien et il a atteint l’agréable