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POUR QU’ON LISE PLATON

n’a qu’un principe et qu’un souci, c’est d’exclure et d’éliminer la compétence. Le gouvernement d’Athènes consiste essentiellement à écarter du gouvernement ceux qui peuvent avoir la science du gouvernement ou l’art de gouverner.

La science ou l’art de gouverner est nécessairement inconnu de la multitude, qui ne connaît rien ; la science ou l’art de gouverner est même inconnu du « grand nombre » qui connaît peu de chose et donc qui ne connaît pas la plus difficile des sciences. Le gouvernement d’Athènes est donc la volonté de confier un travail à quelqu’un qui ne sait pas le faire ; c’est l’incapacité intronisée ; c’est le triomphe de l’incompétence ; c’est l’incompétence déclarée compétente à l’exclusion de toute compétence. C’est un gouvernement antigouvernemental, pareil à ce que serait une science qui se déclarerait antiscientifique. C’est un pur contresens, un pur non-sens et même un peu un monstre.

Dans nos recherches sur le meilleur ou les meilleurs des gouvernements nous serons toujours guidés, au moins, par cette idée négative que le gouvernement démocratique est le pire des gouvernements et que tout ce qui s’en écarte a chance d’être bon et que tout ce qui n’est pas lui est meilleur que lui. C’est au moins une pierre de touche. Platon ne sera jamais aveuglé par son patriotisme.