Page:Faguet - Zola, Eyméoud.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 17 —

C’était donc un romantique de second ordre, qui aurait paru très mince personnage, avec son style gros et lourd et incorrect, aux environs de 1830 ; mais ce qui est plus intéressant c’est de voir comment le romantisme s’est déformé en lui. Il s’est déformé de telle sorte que Zola sera un document d’histoire littéraire très intéressant pour qui se demandera vers quoi le romantisme tendait sans le savoir, à travers ses essors, ses envolées et ses splendeurs.

Il s’est déformé à travers le cerveau de Zola comme à travers celui d’un lecteur vulgaire, illettré et barbare, des romantiques en 1840. Figurez-vous un homme sans instruction, sans culture historique, philosophique et littéraire, ignorant des classiques français et des littératures étrangères, lisant les romantiques de 1830 sous le règne de Louis-Philippe. La grandeur mélancolique de Chateaubriand, la grandeur de promontoire solitaire, lui échappe ; la sensibilité amoureuse et religieuse de Lamartine lui échappe ou lui répugne ; la tristesse désespérée de Vigny lui échappe, non par elle-même, mais par la discrétion hautaine dont elle s’enveloppe ; la beauté sculpturale ou pittoresque de Victor Hugo et sa musique merveilleuse sont pour lui lettres hébraïques. Mais dans ces mêmes