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la danse macabre


Une autre a tout mon cœur, une autre a tous mes vœux,
Plus belle que l’amour, plus belle que vous-même ;
Rien n’approche en splendeur la merveille que j aime.
Car elle est l’abrégé des merveilles des cieux.

Elle est tant au delà des sublunaires charmes,
Que si vous la voyez, loin de rendre les armes,
Vous la trouverez laide, informe et sans appas :

Moi seul vois ses beautés dont j ai l’âme saisie ;
En vain m’incitez-vous à mon apostasie.
Passez votre chemin, je ne vous connais pas.

Il s’en va en parlant tout haut seul, comme en un rêve.
Sans entendre Sancho Pança qui dit : — Monsieur,
Remarquez-vous cette impudique fille d’Ève
A la poitrine maigre et louche des deux yeux.

La dame vient à Dante avec un lent sourire ;
Mais lui :
 — Je connais bien ce sourire et ta voix ;
À travers eux j’observe un squelette reluire…
Puis il chante en faisant un grand signe de croix :

— Servants du dieu d’Amour connaissez-vous la dame
Vers qui j’essore, ardents et purs, tous mes pensers,

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