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SUR LE LAC

Jusqu’à onze heures, ce fut, comme qui dirait, une soirée distinguée : chant, musique, déclamations. Tiens ! Chose, là, que je ne te nommerai pas par charité, nous vociféra « La Conscience de Victor Hugo. As-tu entendu cela de chez vous ? Toute la famille échevelée, le forgeron Ubald Caïn et l’autre « Jabel, le père de ceux qui vont ». J’en passe et je l’épargne.

Après onze heures, promenade dans la ville. Si tu entends dire que le cordonnier Létourneau a perdu son enseigne, conseille-lui de m’en parler. Il était au moins deux heures du matin quand nous songeâmes à nous coucher. Il fallut s’installer tant bien que mal, sur le sofa, à terre, sur des robes de carriole, etc.

Mais voilà qu’à peine m’étais-je endormi, je sentis sur mon front une sueur froide. Qu’est-ce ? m’écriai-je, en m’éveillant. Un beau gobelet d’eau en plein visage, sous prétexte que je ronflais…

Enfin à sept heures, départ pour Montréal et rentrée à la maison paternelle. T’avouerai-je que la mère n’était pas contente tout de suite de mon retard ? Elle ne me l’a pas envoyé dire. Tu sais, les mamans d’aujourd’hui, elles voudraient toujours nous garder dans leur tablier, ainsi qu’au temps où nous portions des langes. Dieu sait si je respecte la mienne ! Mais, bon sens ! faut-il bien qu’un jour ou l’autre, on commence à marcher tout seul.

Cela dit, je te serre les cinq phalanges, et je te salue comme

Ton meilleur ami,
GASTON.