Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/13

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s’y était résigné ; mais c’était maintenant le remords de tous ses jours. Et ce remords se dépensait en mille menus obstacles élevés contre la piété pratiquante de mademoiselle Dax. Par exemple, M. Dax autorisait une confession par mois, mais une seule.

— Où allez-vous à la campagne, cette année ?

— En Suisse, père. M’man a déniché un petit trou tranquille, – Saint-Cergues. – Il paraît qu’on ne peut rien imaginer de mieux pour la santé de Bernard…

Bernard était le frère cadet d’Alice, et la santé de Bernard, lequel d’ailleurs se portait fort bien, figurait au premier rang parmi les anxiétés paternelles et maternelles. M. et Mme Dax, merveilleusement dissemblables de tous autres points, s’accordaient en ceci seul, qu’ils préféraient tous deux leur fils à leur fille, et ne dissimulaient, ni l’un ni l’autre, cette préférence.

— Il n’est pas malade, Bernard ? – demanda imprudemment l’abbé Buire.

Mademoiselle Dax, ainsi provoquée, tomba dans le péché d’envie.

— Malade ? comme moi ! Il s’est inventé des migraines, parce qu’il espérait se faire envoyer à Trouville ou à Dieppe. Et ça a très bien pris. Seulement le médecin a ordonné la montagne au lieu de la mer ; et Bernard déchante joliment, lui qui comptait sur un casino avec des opérettes ! C’est bien fait pour lui : je pourrais en attraper, moi, des migraines : je sais ce que ça me rapporterait !