Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/239

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Mademoiselle Dax a pâli davantage. Un frisson glace toute sa chair, et ses lèvres exsangues font un grand effort pour balbutier :

— Viendra-t-il vraiment, celui qui m’aimera… et que j’aime ?…

Elle est immobile au milieu du sentier sombre. Elle se tient très droite, et sa tête seule s’incline en avant, comme prête à recevoir un grand coup, un coup mortel. Mais le coup mortel ne vient pas. Un bras câlin entoure soudain les épaules tremblantes et une voix chaude murmure :

— Qui vous dit qu’il n’est pas venu ?…


La nuit maintenant succède à la brune. Un silence souverain s’est abattu sur le parc, car les oiseaux eux-mêmes se sont tus, et le vent froid, qui pousse là-haut les nuages lourds de pluie, ne s’abaisse pas jusqu’aux feuillages figés et muets.


À pas lents, mademoiselle Dax revient vers la grande allée, et Fougères presse doucement la taille qui s’abandonne…

— Oh ! – s’écrie tout à coup la jeune fille ; – mais il fait noir !… Quelle heure est-il !…

Elle cherche sa montre dans son corsage. Fougères tire la sienne de son gousset :

— Cinq heures et demie… Est-ce trop tard ?

— Oui… non… Ça ne fait rien… Ne soyez pas inquiet, je me débrouillerai n’importe comment… Une scène de plus ou de moins, qu’est-ce que ça me