Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 1.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
ARC
113

peindre la figure humaine, pour rendre la vie, le mouvement.

L’histoire d’un petit peuple qui vivait dans le bassin du Jourdain, sur la terre de Chanaan, plus tard la Judée, plus tard la Palestine, qui nous a laissé des livres sacrés remplis de mythes aussi intéressants que la Tour de Babel, j’ai nommé les Hébreux, n’a guère laissé de traces de son architecture.

« Les constructeurs sont flétris, raillés… », ainsi apprécie Michelet sur l’antiquité juive. Il est exact que peu de monuments nous sont laissés par les Hébreux. Seul, un roi fastueux, Salomon, fit construire le temple de Jérusalem, qui s’élève à l’Est de cette ville, sur une colline aplanie et remblayée. De nombreux architectes phéniciens, médiocres architectes d’ailleurs, ayant sous leurs ordres plus de 30.000 ouvriers, y travaillèrent pendant de longues années.

Le sanctuaire qui a près de 15 mètres de hauteur, est entouré de constructions à trois étages où se trouvent les logements des prêtres. Un majestueux portique y donne accès. Il est divisé en deux parties que sépare une immense tapisserie « le voile du Temple ». La salle la plus grande, c’est le « lieu saint » où s’élève l’autel de cèdre et d’or sur lequel brûlent des parfums, la « Table des pains de proposition » et dix candélabres d’or à sept branches. La plus petite salle, plus obscure, est le « Saint des Saints » où le Grand-Prêtre ne pénêtre qu’une fois l’an. C’est là qu’est déposée l’Arche d’Alliance entourée de colossales statues de chérubins aux ailes déployées.

Devant le portique du sanctuaire, se dressent deux colonnes monumentales de bronze. Près de là se trouve l’autel des holocaustes — sur lequel sont apportés la fleur de farine, l’huile, le vin, les parfums et les bêtes égorgées en l’honneur de l’Éternel — et une coupe colossale supportée par douze taureaux groupés trois par trois. C’est « la mer d’airain » qui sert à contenir l’eau nécessaire pour laver le sang répandu par les animaux sacrifiés.

Plusieurs cours ou parvis s’étendent autour du sanctuaire, depuis la cour des Gentils, où tout le monde peut pénétrer, jusqu’à celle qui, plus proche du temple, est réservée aux prêtres.

Les Phéniciens qui vivaient sur le littoral de l’actuelle Syrie, en tribus sémites, créèrent « l’architecture navale ». Peuple de navigateurs et de commerçants, ils précédèrent les Vénitiens, les Génois, les Pisans, les Hollandais et les Portugais. Ils construisirent les premiers bateaux qui circulèrent dans la Méditerranée.

Dans leurs constructions, ils s’inspirèrent des formes égyptiennes et assyriennes et il ne subsiste presque rien de leurs monuments. Ils étaient célèbres par la richesse des matériaux employés plus que dans l’art de construire : une coupole d’or recouvrait un temple de Carthage, des colonnes d’or et de verre aux multiples couleurs se retrouvaient dans presque tous les temples phéniciens, mais généralement dans l’architecture phénicienne le bois plaqué de métaux paraît avoir été employé de préférence à la pierre. Leurs nécropoles sont taillées simplement dans le roc.

La Grèce ancienne dont l’histoire est un drame à la fois grandiose et douloureux avait à la fois des hommes d’État, des artistes, des penseurs et des architectes. La conformation de son territoire, ses côtes sculptées par la mer, ses îles nombreuses en firent comme les Phéniciens, un peuple de navigateurs et les Grecs bâtirent des sanctuaires aux dieux qui protégeaient leurs navires.

Dans l’Île de Cythère, les colombes d’Astarté, la Vénus phénicienne avaient leurs temples. Pour M. Seignobos, le Minotaure de Crête « rappelle l’idole d’airain

du dieu Melkart, à la tête de taureau dans laquelle on faisait brûler des enfants ».

Une légende grecque veut que le roi Cadmus soit venu de Phénicie jusqu’en Grèce et y ait fondé en Boétie, la ville de Thèbes.

Les vestiges de la première civilisation grecque n’ont apparu à la lumière que dans la dernière partie du xixe siècle. Vers 1870, l’Allemand Schliemann fit fouiller les alentours du point présumé où s’élevait l’antique Troie, il y trouva les ruines d’une forteresse et une foule d’objets d’usage et de luxe (Troie fût brûlée par les Grecs, après un siège de dix ans). Au Péloponèse, Schliemann fouilla l’emplacement de Mycène, qui avait frappé l’attention des archéologues, par une ceinture de murailles formée d’énormes blocs de pierre asymétriques. Leur entassement formidable et d’aspect chaotique leur ont fait donner par les Grecs, le nom de murs cyclopéens. On retrouve d’ailleurs ces murs préhistoriques autour de maintes villes anciennes d’Asie Mineure et d’Italie. « Ils ne sont pas sans affinité avec les dolmens de l’Europe Occidentale et témoignent d’un état social analogue, où des milliers d’hommes devaient obéir aux ordres d’un petit nombre de chefs et travailler dans leur intérêt ou pour leur gloire », écrit Salomon Reinach.

À Mycène, l’enceinte des cyclopes s’ouvre sur le chemin d’accès à la vieille citadelle, par une porte mégalithique célèbre : la Porte des Lions. Au-dessus d’un portique semblable à un dolmen, deux lions se dressent sur leurs pattes de derrière ; de leurs pattes de devant, ils s’appuient symétriquement sur le piédestal d’une colonne qui les sépare ; leurs têtes étaient de bronze doré : aussi elles ont disparu. Non loin de là se dresse le Trésor d’Atrée, vaste rotonde en pierres superposées sans ciment ; elles étaient jadis rehaussées d’ornements de bronze.

En 1884, Schliemann porte ses recherches à Tirynthe fondée par le héros Persée. L’enceinte fortifiée de la ville et les fondations de l’antique palais furent découvertes.

Cette civilisation irait de l’an 2000 à 1100 av. J.-C.

En 1900, l’archéologue Evans exhuma à Cnosse, dans l’île de Crête, le palais qu’aurait habité le légendaire roi Minos. C’était le Labyrinthe. À l’image des palais assyriens, son architecture admettait un lacis extraordinairement enchevêtré de corridors et de couloirs. Les murs revêtus de mille bas-reliefs de gypse et de peinture à fresques fort singulières.

Les Grecs adorèrent une pléiade de Dieux. La mer est animée par un dieu, un dieu fait briller le feu, un dieu mène les vents, une déesse fait pousser les fruits, il y a une déesse dans une source, il y en a des milliers dans une forêt, la guerre est le royaume d’un dieu farouche, c’est l’anthropomorphisme :

Regrettez-vous le temps où le ciel sur la terre
Marchait et respirait dans un peuple de Dieux ?
Où Vénus Astarté, fille de l’onde amère,
Secouait, vierge encore, les larmes de sa mère
Et fécondait le monde en tordant ses cheveux.


ainsi s’exprimait Alfred de Musset, à une époque où les femmes n’avaient pas encore pensé à se faire couper une des plus belles parures qui ornât leur corps.

En Grèce, la plus belle offrande qu’on pouvait faire à un dieu était de lui construire un temple. L’oracle le plus célèbre de la Grèce était celui de Delphes juché dans les anfractuosités sauvages d’une montagne de Phocide.

Les Allemands qui ont fouillé en 1875, les ruines du temple d’Olympie y ont retrouvé 40 monuments annexes, 130 sculptures de marbre, 13.000 objets de bronze. Le temple haut de 20 mètres et long de 65 mètres