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franche) formeront le rachat pour autant de ce que la liquidation des dettes publiques aura pu laisser.

Les guerres ont toujours été de nature économique et la dernière plus encore que les autres n’a servi qu’aux appétits du capitalisme et rentiérisme. Le sol franc est la réalisation de la paix. Sans lui il n’y a pas la liberté d’aller et de venir, sans lui pas dé commerce franc (libre), parce que les douanes, les restrictions de toutes sortes en forme de passeports, droit d’importation et d’exportation, etc., etc., enfin cette affreuse protection du commerce national, etc., ne sont que des moyens qu’emploient les rentiers pour protéger et garantir leur puissance, voir : « le revenu sans travail ».

Pour plus de détails, et pour approfondir les aperçus généraux ci-dessus, je renvoie à nouveau à la lecture de la littérature franchiste (physiocrate) et je peux dire que :

La réalisation du revenu intégral par le travail, c’est la solution de la question sociale, il n’y en a pas d’autre.
Charles Rist.
BIBLIOGRAPHIE

Die natuürliche Wirtschaftsordnung durch Freiband und Freigeld, de Silvio Gesell.

(Cette œuvre fondamentale est en traduction dans différentes langues).

Dr Th. Christen, Fritz Schwarz, Han Barral et d’autres ont écrit des brochures diverses.


FRANC-MAÇONNERIE n. f. Dans l’opinion vulgaire, que l’Église romaine a créée et contribue à répandre dans les pays soumis à son influence, la franc-maçonnerie est une association composée d’hommes liés entre eux par des serments mystérieux, par une étroite discipline et obéissant à un mot d’ordre et à des directives communes. Soumis en apparence aux lois de leurs pays respectifs, ne reconnaissant en réalité d’autre autorité que celle des chefs de leur « secte », les francs-maçons chercheraient à assurer leur domination sur les gouvernements, et ils poursuivraient comme but principal tout au moins la disparition des religions, principalement du christianisme, et aussi, disent les prêtres, l’anéantissement des institutions qui constituent le fondement de la société actuelle, la famille, la propriété, etc.

De cette opinion vulgaire à la réalité, et même à une opinion plus éclairée, qu’influence moins la rumeur superstitieuse issue des confessionnaux, il y a très loin.

Comme nous le verrons, les origines de la franc-maçonnerie paraissent un peu obscures, en raison d’innombrables fables et d’histoires fantastiques, imprimées dans une copieuse littérature, principalement au xviiie siècle et au commencement du xixe. Cette littérature, émanant tantôt d’amis enthousiastes, tantôt d’adversaires fanatiques, tantôt de simples fumistes ou de publicistes cherchant à satisfaire par des inventions quelconques la curiosité du public, n’est pour l’historien qu’une source d’informations des plus suspecte. Mais lorsqu’il s’agit non plus des origines, mais de l’organisation actuelle de la franc-maçonnerie, de sa constitution et de ses règlements, de sa composition, des ordres du jour, des discussions et des décisions de ses assemblées, de son programme et de ses moyens d’action, de ses projets et de ses méthodes, nous avons une documentation tellement abondante et tellement précise que rien ne reste dans l’ombre de tout ce qui concerne cette association. Sa constitution, ses règlements, ses rituels, tout est imprimé et à la disposition du public. En France, les comptes rendus sténographiés de ses assemblées, les ordres du jour des réunions des loges, les travaux des Conseils directeurs, font l’objet de publications périodiques que l’on trouve facilement partout.

Surveillée et espionnée par diverses organisations beaucoup plus « secrètes » qu’elle-même, la franc-maçonnerie a compté souvent parmi ses membres, même dans

ses organismes centraux, des hommes qui l’ont « trahie » et qui ont pu raconter les prétendus mystères de cette vieille institution. Lorsqu’au début de ce siècle, l’une des associations maçonniques, le Grand-Orient de France, a été sollicitée de donner son concours aux pouvoirs publics pour leur fournir des renseignements utiles à la politique anticléricale, le rôle joué à cette époque par le Grand-Orient a été vite connu, et a fait l’objet de ce qu’on a appelé le scandale des fiches.

On peut affirmer aujourd’hui qu’il n’y a pas au monde d’association travaillant plus au grand jour que l’association maçonnique. La moindre société commerciale, artistique, littéraire ou de bienfaisance, possède plus de « secrets » qu’un groupement qui fait promettre à ses adeptes, lors de « l’initiation », de conserver le secret.

Rien donc n’est plus facile que de rechercher, avec d’innombrables documents facilement contrôlables ce qu’est et ce que veut la franc-maçonnerie. Et nous le répétons, la réalité ne correspond guère à l’opinion ou aux préjugés répandus un peu partout.


I

La franc-maçonnerie apparaît sous la forme d’un grand nombre de petites associations portant le nom de loges ou d’ateliers et qui se régissent avec la plus entière autonomie. Chaque loge porte un titre distinctif et procède aux admissions ou radiations de ses membres. Tantôt les loges sont isolées et tantôt — c’est le cas le plus fréquent — elles sont unies à d’autres par un lien fédéral comportant une administration centrale. La Fédération porte le nom de « Grande loge » ou de « Grand Orient ». Les Grandes loges sont parfois unies entre elles par des rapports plus ou moins étroits, plus ou moins fréquents. En général, ces rapports consistent dans l’envoi de délégués à des fêtes, banquets ou cérémonies maçonniques, dans l’échange des imprimés ou publications émanés de chacune d’elles, et dans la promesse mutuelle de ne pas constituer d’ateliers dans la région ou dans le pays que chacune prétend avoir sous son « obédience ». Il ne s’agit donc pas là d’un lien fédéral à proprement parler. Tous les documents maçonniques montrent que ces Grandes loges, jalouses de leur autorité, de leur méthode, de leurs usages particuliers, n’ont aucune administration centrale susceptible d’organiser une action commune.

Sous réserve de ce que nous dirons à la fin de cette étude, à propos des tentatives d’organisation de Congrès ou d’Association maçonniques internationales, il apparaît donc que, contrairement aux préjugés en cours, la franc-maçonnerie n’obéit pas à une directive, à un mot d’ordre donné par une autorité supérieure qui régirait tous les francs-maçons du monde. Il apparaît, au contraire, que beaucoup de « Grandes loges » ont des tendances philosophiques diverses ou contradictoires qui ne leur permettent d’avoir entre elles aucune espèce de rapports. Il est par exemple de notoriété publique que les Grandes loges anglaises ou américaines placées sous l’invocation du « Grand Architecte de l’Univers », sont essentiellement religieuses et traditionalistes. Les candidats doivent prêter serment sur la Bible ; la croyance en Dieu et dans l’immortalité de l’âme constituent pour tous leurs membres un article de foi. Les réunions de ces Grandes loges commencent par des prières et sont exclusivement consacrées au cérémonial maçonnique. Les controverses sur des sujets philosophiques, économiques ou politiques n’y ont pas la moindre place. Ces réunions ne constituent que des cérémonies consacrées à des admissions, d’après les rituels en usage, et généralement suivies de banquets.

Ces Grandes loges (anglaises ou américaines) prétendent être restées fidèles à la véritable tradition maçonnique, et elles considèrent avec une sorte d’horreur les