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cimetière et interdit les processions qui s’y rendaient. Les Français sont frondeurs, et aussi vît-on des affiches portant ces mots : « De par le Roi, défense à Dieu de faire miracle en ce lieu. » Cependant, lorsqu’un décret royal devint loi par l’enregistrement au Parlement (1730), la résistance des jansénistes fut graduellement supprimée. Les Oratoriens finirent par accepter la bulle en 1746. Cependant il s’éleva de nouvelles difficultés. L’archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, partisan passionné de la bulle Unigenitus, fit de l’opposition au Parlement et aux ministres qui avaient des tendances jansénistes ; il fut, à cause de cela, exilé loin de Paris, ce qui ne l’empêcha pas de commander à ses prêtres de refuser la communion à tous ceux qui n’acceptaient pas la bulle. Enfin la paix fut rétablie par une lettre pastorale de Benoît XIV en 1756. Le parti janséniste resta très influent parmi le clergé français. La plupart des membres ecclésiastiques des États-Généraux de 1789 étaient jansénistes. A la Restauration, le jansénisme eut d’assez nombreux zélateurs. Sous le Second Empire les jansénistes eurent un organe officiel : L’Observateur catholique.

En Italie, plusieurs évêques, partisans des réformes de Léopold II de Toscane et de Napoléon, comme Ricci, évêque de Pistoïa, et Capece-Latro, archevêque de Tarente, passent pour avoir été jansénistes.

Tandis qu’en France le jansénisme restait une école théologique, dans les Pays-Bas il devint une secte régulière. En 1704, Codde, vicaire apostolique de l’archevêque d’Utrecht, fut déposé par le pape à cause de ses idées jansénistes, mais le Chapitre refusa d’admettre la validité de cette déposition. En 1723, le Chapitre élut un archevêque d’Utrecht qui fut consacré par l’évêque français de Babylone in partibus, qui avait dû se réfugier à Amsterdam. Le pape, informé de l’élection, répondit par une lettre d’interdiction. L’archevêque en appela de l’interdiction papale à un concile général futur, appel qui a été répété par tous ses successeurs. L’archevêque suivant, Barckman Wuytiers, reçut des lettres de félicitation de nombreux évêques, plus de 100 de ces lettres sont conservées dans les archives de l’Église d’Utrecht. Après la mort de l’évêque de Babylone, l’archevêque Meindaarts (élu en 1739) rétablit le siège suffragant de Haarlem en 1742, et de Deventer en 1758, pour assurer la succession apostolique.

En 1856, les évêques jansénistes publièrent une protestation contre la proclamation du dogme de l’Immaculée-Conception.

Les jansénistes exercent une grande influence intellectuelle et morale en Hollande, où ils sont fort estimés, bien que l’immense majorité de la population de la Hollande soit protestante.

Le concile œcuménique du Vatican, en 1870, fit faire un grand progrès au jansénisme. Quelques remarquables théologiens munichois refusèrent d’adhérer au dogme de l’infaillibilité du pape.

Ils se séparèrent avec éclat de l’Église ultramontaine et fondèrent l’Église vieille catholique. Leurs évêques furent consacrés par l’archevêque janséniste d’Utrecht. Il y a beaucoup d’églises vieilles catholiques dans l’Allemagne catholique ; des Facultés de théologie vieille catholique existent dans plusieurs Universités.

A Genève, le gouvernement auquel appartenaient plusieurs catholiques libéraux, interdit la publication du dogme de l’infaillibilité qui met l’autorité ecclésiastique au-dessus de la constitution civile. Le Conseil d’État (Conseil des ministres de la République génevoise) s’empara des églises catholiques du canton et nomma. des prêtres libéraux qui fondèrent une Église catholique nationale. On fit appel au Père Hyacinthe Loison, le grand orateur qui, lui aussi, n’avait pas voulu admettre l’infaillibilité. Mais Hyacinthe Loison ne tarda pas à se quereller avec ses ouailles. Son mariage choqua les

vieux catholiques encore partisans du célibat des prêtres. Il quitta Genève pour aller fonder à Paris une église catholique nationale qui ne dura pas longtemps. Les villages catholiques de la république du canton de Genève, annexés en 1815 à Genève par le congrès de Vienne pour écraser le protestantisme dans la Prusse calviniste, étaient restés fermement attachés aux anciens prêtres ; les nouveaux, nommés par le gouvernement, pour la plupart des prêtres français opposés au dogme nouveau, ne surent pas gagner l’affection de leurs paroissiens. Les églises étaient vides ; les catholiques romains ouvraient de nouveaux lieux de culte. Enfin l’État rendit aux catholiques romains l’Église Notre-Dame, la principale église catholique de la ville, ne conservant au culte national que deux églises. Les catholiques jansénistes sont appelés catholiques chrétiens. Ils ont encore 2 ou 3 prêtres et publient un petit journal. Quoique haïs par les catholiques romains, les prêtres catholiques chrétiens sont grandement estimés de la population. La séparation des Églises et de l’État votée par le peuple, rend la position économique des catholiques chrétiens difficile, tandis que les églises catholiques ultramontaines reçoivent de grandes subventions de Rome et d’ailleurs. Les prêtres catholiques chrétiens ont été consacrés par les évêques jansénistes de la Suisse allemande.

A Berne, le Kultur Kampf avait été des plus violents. Le gouvernement bernois avait fait défendre la lecture du Syllabus dans les églises catholiques. L’évêque de Bâle, Lachat, résidant à Saleure, déclara qu’Il ne reconnaissait pas les ordres du gouvernement et que le pape était au-dessus des gouvernements. Tous les prêtres du Jura bernois se déclarèrent solidaires de l’évêque et résolus à ne pas obéir aux lois.

Le gouvernement les expulsa tous et ferma les couvents. Ce fut le signal d’une guerre violente. Le gouvernement ayant fait appel à des prêtres français opposés au Syllabus, entre autres à l’abbé Deramey, professeur en Sorbonne, les paroissiens fuyaient les églises, attaquaient les nouveaux curés toutes les fois qu’on les rencontrait seuls. On coupait les arbres des jardins des curés, on enduisait d’excréments les poignées des portes des curés appelés intrus. Quand les femmes des leaders catholiques rencontraient les nouveaux curés, elles se frappaient sur les fesses, de sorte que le journal Le Frondeur, de Délémont, avait créé l’ère du « salut à la mode ». Les curés libéraux avaient lancé plusieurs journaux, mais les ultramontains possédaient beaucoup d’argent et leur autorité excitait la haine contre les jansénistes.

Enfin le Conseil fédéral suisse ordonna au gouvernement cantonal bernois d’organiser un plébiscite sur la question des prêtres. La majorité réclama ses anciens curés et les prêtres libéraux durent quitter la Suisse. Il n’y a plus que quelques églises vieilles catholiques : à Bienne, à Berne, etc. Une Faculté de théologie vieille catholique existe encore à Berne ; les professeurs ont été consacrés par l’évêque janséniste suisse. Les étudiants, à la fin de leurs études, deviennent curés des paroisses catholiques nationales, mais le mouvement ne progresse guère ; quand un catholique romain est convaincu des erreurs de son Église, il devient généralement libre penseur et ne s’arrête pas à moitié chemin, au jansénisme ou au protestantisme. — G. Brocher.


JAUNE adj. et subst. m. C’est dans un sens bien spécial qu’il nous faut prendre ce mot. Il ne s’agit pas — évidemment, et c’est regrettable, — de dire notre goût sur la nuance elle-même ou de la poétiser en parlant de la fleurette des champs et des bois qui charme les yeux et réjouit tout un paysage. Rien d’admirable, dans la verdure, comme le bouton-d’or et le genêt. Mais la signification que nous allons étudier n’a aucun rap-