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Page:Fayol, Henri - Administration industrielle et générale, 1917.djvu/57

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si F et P renseignent immédiatement leurs chefs respectifs sur ce qu’ils ont fait d’un commun accord. Tant que F et P restent d’accord et que leurs opérations sont approuvées par leurs chefs directs, les relations directes peuvent se poursuivre ;’dès que l’accord disparaît ou que l’approbation des chefs manque, les relations directes cessent et la voie hiérarchique est immédiatement rétablie. Tel est le régime de fait que l’on peut constater dans la grande majorité des affaires. Il comporte l’habitude d’une certaine initiative à tous les degrés de l’échelle. Dans la petite entreprise, l’intérêt général, c’est-à-dire celui de l’entreprise elle-même, est facile à saisir et le patron est là pour rappeler cet intérêt à ceux qui seraient tentés de l’oublier.

Dans l’Etat, l’intérêt général est chose si complexe, si vaste, si lointaine, qu’on ne s’en fait pas facilement une idée nette ; et le patron est une sorte de mythe pour la presque totalité des fonctionnaires. S’il n’est pas sans cesse ravivé par l’autorité supérieure, le sentiment de l’intérêt général s’estompe, s’affaiblit et chaque service tend à se considérer comme étant à lui-même son but et sa fin ; il oublie qu’il n’est qu’un rouage d’une grande machine dont toutes les parties doivent marcher d’accord ; il s’isole, se cloisonne et ne connaît plus que la voie hiérarchique. L’emploi de la passerelle est simple, rapide, sûr ; il permet aux deux agents F et P de traitor, en une séance, en quelques heures, telle question qui, par la voie hiérarchique, subira vingt transmissions, dérangera beaucoup de monde, entraînera une énorme paperasserie, fera perdre des semaines ou des mois pour arriver à une solution généralement moins bonne que celle qu’on aurait obtenue en mettant directement en contact F et P.

Est-il possible que de telles pratiques, aussi ridicules que funestes, soient en usage ? On n’en peut malheureusement pas douter en ce qui concerne les -services de l’Etat.