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MADELEINE NEVEU

Mais ces vers, on le reconnaîtra bientôt, devaient recevoir leur démenti de la destinée.

Avec une renommée contemporaine si brillante, on ne s’étonnera pas que les œuvres de madame des Roches aient été souvent reproduites. Elles avaient paru d’abord à Poitiers ; mais, enrichies d’additions successives, elles ne tardèrent pas à être publiées à Paris même, et par l’imprimeur alors en vogue, l’Angelier. Aux poésies on y trouve jointes des Lettres en prose écrites d’un ton familier et sur des sujets très-divers. Il en est qui traitent de questions de morale ; il en est même d’un intérêt purement philologique : l’une, par exemple, roule sur le mot proterve, dont l’emploi lui avait été reproché comme celui d’un terme écorché du latin. Madame des Roches le défend dans une discussion pleine, dit Colletet, de bonnes et gentilles pensées, où elle allègue notamment qu’elle l’a emprunté au premier chant de l’Arioste, « petit larcin, ajoute-t-elle, qui doit être d’autant plus justement permis qu’au temps de guerre où elle écrivait, le pillage était presque pratiqué de tous. »

L’édition la plus complète, celle de 1604[1], se termine par des stances composées à l’occasion de ce tournoi de beaux esprits, dont le grave jurisconsulte Étienne Pasquier fut, dans un de ses moments de gaieté, le principal tenant, et dont mademoiselle des Roches fut l’héroïne. Une puce aperçue, dans une visite de l’avocat,

  1. Elle est de Rouen ; et c’est une preuve, entre beaucoup d’autres, que la vie littéraire était bien loin d’être alors, comme de nos jours, concentrée presque entièrement à Paris.