Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 1.djvu/135

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son crime, juroit de ne lui point laisser de repos qu’il ne l’eût avoué, et s’engageoit dans ce cas à ne jamais lui en reparler. C’étoit là le motif qui l’avoit porté à se reconnoître coupable, malgré son innocence, et il se seroit aussi bien accusé d’un meurtre, s’il avoit plu à sa femme de l’y contraindre.

Mistress Partridge ne put entendre de sang-froid cette imputation. Dans la conjoncture présente, les larmes étoient son unique ressource. Elle y eut recours, et en répandit une grande abondance ; puis s’adressant à M. Allworthy : « Monsieur, s’écria-t-elle, daignez, je vous prie, m’écouter. Il n’y eut jamais une pauvre femme plus outragée que moi. Ce n’est pas le seul manque de foi que j’aie à reprocher à ce méchant homme : non, monsieur, il m’a donné cent autres preuves d’infidélité. J’aurois pu lui passer son ivrognerie et sa paresse, s’il n’avoit pas violé l’un des principaux commandements de Dieu. Encore s’il avoit commis le crime hors de chez moi, j’en aurois été moins offensée ; mais le commettre avec ma propre servante, dans ma propre maison, sous mon propre toit ! souiller mon chaste lit avec d’infames créatures !… Oui, vilain, vous l’avez souillé, et vous osez m’accuser de vous avoir arraché par force l’aveu de la vérité ! Peut-on croire, monsieur, je vous le demande, que