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en avoit Tom, ils manifestent leur aimable penchant par des manières obligeantes et gracieuses, envers le sexe en général. Celles de notre héros formoient un contraste frappant avec la bruyante rusticité des gentilshommes campagnards, et le ton froid et cérémonieux de M. Blifil : aussi à l’âge de vingt ans, passoit-il aux yeux des femmes du voisinage pour un jeune homme charmant.

La conduite de Tom avec Sophie n’étoit remarquable que par une expression particulière de déférence et de respect, distinction que méritoient la beauté, la bonne grace, l’esprit et la fortune de cette jeune personne. Quant à des vues sur elle, il n’en avoit aucune. Qu’on l’accuse, à présent, si l’on veut, de sottise ; il est possible que nous soyons en état de le justifier plus tard de ce reproche.

Sophie joignoit à l’innocence et à la candeur d’un ange, une extrême sensibilité. La présence de Tom augmentoit singulièrement en elle cette disposition. Notre jeune homme, sans son inexpérience et son étourderie, n’auroit pas manqué de s’en apercevoir, et peut-être M. Western, s’il eût été capable de penser à autre chose qu’à ses chevaux et à ses chiens, en auroit conçu de l’ombrage ; mais le bon écuyer, loin de se défier de rien, laissoit à Tom autant d’occasions de s’entretenir avec sa fille, qu’en auroit pu souhaiter