Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 3.djvu/79

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gauche les chevaux de mon maître ; mais le pis qui puisse m’arriver, c’est qu’il me mette à la porte, et deux guinées me dédommageront toujours un peu de la perte de ma place. »

Le marché conclu, le guide prit la direction de Bristol, et notre héroïne suivit les traces de son amant, malgré les représentations d’Honora, qui avoit bien plus d’envie de voir Londres, que de voir M. Jones. Il s’en falloit de beaucoup qu’elle le servît auprès de sa maîtresse. Elle ne lui pardonnoit pas sa négligence à s’acquitter de certaines politesses pécuniaires que l’usage prescrit aux galants, envers les soubrettes, dans les intrigues d’amour, surtout dans celles d’une nature clandestine. Cet oubli de la part de Jones, venoit plutôt de son étourderie que d’un défaut de générosité. Honora l’imputoit peut-être à cette dernière cause. Quoi qu’il en soit, il est certain qu’elle le haïssoit de tout son cœur, et qu’elle s’étoit promis de saisir toutes les occasions de lui nuire dans l’esprit de sa maîtresse. Ce fut donc pour elle un fâcheux contre-temps d’avoir passé par la même ville et de s’être arrêtée à la même auberge d’où M. Jones ne faisoit que de partir. C’en fut un plus fâcheux encore, que le choix fortuit du même guide, et la découverte qui en résulta.

Nos voyageuses parvinrent au point du jour à