Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/124

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demoiselle, dit-il à Sophie, suivez-moi de bonne grace, ou je vous ferai porter dans la voiture.

— Je vous suivrai, mon père, répondit Sophie, sans qu’il soit besoin d’employer la violence ; mais permettez-moi d’aller en chaise à porteurs, car je suis hors d’état de supporter la voiture.

— Bon ! voudrois-tu me faire accroire que tu ne peux aller en voiture ? Tu plaisantes sans doute ? Oh ! je ne te perdrai plus de vue que tu ne sois mariée, je t’en réponds.

— Je le vois, mon père, vous avez résolu de me faire mourir.

— Eh bien, meurs, et va-t-en au diable, si un bon mari doit te faire mourir. Je ne donnerois pas un sou, pas un liard d’un enfant rebelle. » En prononçant ces mots il la saisit violemment par le bras. Le ministre s’entremit encore une fois, et le conjura d’user de douceur. Western furieux lui imposa silence en jurant. « Te crois-tu donc en chaire ? lui dit-il. Tu sais que je ne t’écoute guère, même quand tu y es. Apprends que je ne suis pas homme à recevoir des leçons de toi, et à me laisser mener par un prêtre. Bonsoir, milady. Allons, Sophie, sois bonne fille, et tout ira bien. Tu l’épouseras, morbleu ! tu l’épouseras. »

Honora, qui attendoit au bas de l’escalier, fit à l’écuyer une profonde révérence, et se mit en devoir de suivre sa maîtresse. Western la repoussa