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je l’avois vue au bal masqué. Pensez-vous que j’ignore qui étoit la reine des fées ?

— Quoi ! réellement vous avez reconnu la dame du bal masqué ?

— Oui en vérité ; et vingt fois depuis, je vous l’ai donné à entendre ; mais vous m’avez toujours paru si chatouilleux sur cet article, que je n’ai pas osé vous en parler clairement. Mon ami, je juge à votre extrême discrétion que le caractère de la dame ne vous est pas aussi bien connu que sa personne. Point de colère, Tom ; ma foi, vous n’êtes pas le premier jeune homme qu’elle ait pris dans ses lacs. Sa réputation, croyez-moi, ne court aucun risque. »

Quoique Jones n’eût pas lieu de penser qu’avant son commerce avec lui, lady Bellaston eût vécu en vestale, il étoit si étranger à Londres, il en connoissoit si peu les mœurs, qu’il ne se faisoit aucune espèce d’idée de ces femmes d’une réputation équivoque qui, sous une apparence de vertu, lient des intrigues galantes avec quiconque leur plaît, de ces femmes dont quelques prudes évitent la compagnie, mais qui voient, comme on dit, toute la ville, et qu’en un mot chacun juge dignes du nom que personne ne leur donne.

Quand il vit que Nightingale étoit si bien instruit, il crut que la réserve scrupuleuse qu’il