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Ce travail important, c’est-à-dire celui des cartes célestes, fut entrepris par Chacornac, en 1852. Interrompu à la mort de cet astronome, il fut repris, en 1873, par MM. Paul et Prosper Henry. Ces cartes représentent toutes les étoiles, jusqu’à la 13e grandeur, comprises dans la zone écliptique. Chacune de ces cartes, dans son cadre de 32 centimètres, représentant un carré de 5 degrés de côté sur le ciel, il en faudrait 72 semblables pour figurer toute la zone écliptique. 36 de ces feuilles, renfermant 36 000 étoiles, furent construites en 1886 par MM. Henry, qui en terminèrent bientôt d’autres contenant 15 000 étoiles. Ce travail, très long et très minutieux, était poursuivi avec persévérance par ces deux astronomes ; mais ils se trouvèrent arrêtés par la très grande difficulté que présente la partie du ciel où ils étaient arrivés, et qui contient la voie lactée. Dans cette partie, certaines feuilles auraient eu jusqu’à 15 000 ou 18 000 étoiles chacune. Avec une telle condensation d’astres, les procédés ordinaires deviennent à peu près inapplicables. MM. Henry songèrent donc à recourir à la photographie, déjà essayée dans plusieurs observatoires (à Meudon notamment) et qui avait donné en Angleterre de si remarquables résultats pour certains astres aussi pâles que la nébuleuse d’Orion.

La première tentative qu’ils firent, en 1884, avec un appareil provisoire, qui était insuffisant pour le but qu’on poursuivait, réussit pourtant fort bien.

Les épreuves que nous avons vues ont été obtenues avec un objectif de 16 centimètres de diamètre, et de 2m,10 de distance focale, achromatisé pour les rayons chimiques. Elles représentaient, sur une surface d’un peu moins de 1 décimètre carré, une étendue du ciel de 3 degrés en ascension droite et de 2 degrés en déclinaison, et l’on pouvait apercevoir sur le cliché 15 000 étoiles de la 6e à la 12e grandeur, c’est-à-dire jusqu’à la limite de visibilité que permet un objectif de cette dimension. On sait qu’à la vue simple on ne peut apercevoir les étoiles que jusqu’à la 6e grandeur ; il n’y en a qu’une seule dans l’espace figuré sur l’épreuve dont il s’agit. Les diamètres de ces étoiles sont à peu près proportionnels à leur éclat, sauf pour les étoiles jaunes, qui viennent un peu plus faibles.

L’appareil photographique provisoire qui servit à faire ces essais se composait d’une caisse carrée de bois, adaptée à l’une des lunettes équatoriales du jardin, de 25 centimètres d’ouverture, qui formait un puissant chercheur, permettant de suivre les astres avec une très grande précision. On n’a pas employé les plaques au gélatino-bromure.

Les étoiles vinrent avec une telle netteté que nulle part on n’a obtenu des résultats aussi satisfaisants.

Ces premiers résultats engagèrent MM. Henry à construire un puissant appareil spécial pour photographier la voûte céleste.

L’appareil construit par les frères Henry, et qui est établi aujourd’hui à l’Observatoire de Paris, pour reproduire les images agrandies des astres ou des nébuleuses, se compose de deux lunettes juxtaposées, et contenues dans un même tube rectangulaire. L’objectif de la première lunette a 0m,24 d’ouverture et 3m,60 de foyer. C’est une sorte de pointeur ou de chercheur, car son axe optique est parallèle à celui de la lunette photographique. Les deux lunettes ont le même champ. On est donc certain de reproduire une portion du ciel sur le cliché, quand on voit cette même partie dans la première lunette. La seconde lunette, qui sert à la production de l’image photographique, a 0m,34 d’ouverture et 3m,43 de foyer. Elle est achromatisée pour les rayons chimiques. L’appareil est monté de manière à recevoir tous les mouvements convenables pour suivre la marche d’un astre.