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CORRESPONDANCE

Les femmes du Liban portent sur la tête des tasses d’argent ; quelques-unes se placent sur le front des carrés d’un pied et demi de longueur. Il y a encore dans le Liban des gens qui adorent des cèdres comme au temps des prophètes. Le ramassis de toutes les vieilles religions qu’il y a en Syrie est quelque chose d’inouï. J’étais là dans mon centre. Il y aurait de quoi y travailler pendant des siècles.

Maxime a lâché la photographie à Beyrouth. Il l’a cédée à un amateur frénétique. En échange des appareils, nous avons acquis de quoi nous faire à chacun un divan comme les rois n’en ont pas : dix pieds de laine et soie brodée d’or ! Je crois que ce sera chic ! Adieu, chère vieille adorée, reçois sur tes pauvres joues creuses tous les baisers de ton Gustave.


270. À LOUIS BOUILHET.
Constantinople, 14 novembre 1850.

Si je pouvais t’écrire tout ce que je réfléchis à propos de mon voyage, c’est-à-dire que si je retrouvais quand je prends la plume les choses qui me passent dans la tête et qui me font dire, à part moi : « je lui écrirai ça », tu aurais vraiment peut-être des lettres amusantes. Mais, va te faire foutre, cela s’en va aussitôt que j’ouvre mon carton. N’importe, au hasard de la fourchette, comme ça viendra.

D’abord de Constantinople, où je suis arrivé hier matin, je ne te dirai rien aujourd’hui, à savoir seulement que j’ai été frappé de cette idée de