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CORRESPONDANCE

280. À SA MÈRE.
Naples, 9 mars 1851.

Quoiqu’il n’y ait pas de lettre de toi à la poste (peut-être y en a-t-il : c’est une infâme pétaudière, chenil de gredins), je m’en vais t’écrire comme s’il y en avait, pauvre vieille chérie. Car une de mes lettres n’a qu’à manquer et voilà une bonne femme, j’imagine, qui se figure que je suis tombé malade. Bientôt, cependant, va cesser notre correspondance, car j’espère que dans un mois tu ne seras pas loin de t’embarquer. Tâche de partir de Marseille par le bateau du 9. Par ce moyen, tu seras à Rome pour la semaine sainte ; ça en vaut la peine.

Naples est vraiment un séjour délicieux, quoique jusqu’à présent nous n’ayons guère joui de ses beautés. Tout notre temps est employé au musée des antiques, qui est inépuisable. La nuit dernière je n’ai pas dormi, tant j’avais la tête pleine de bustes d’impératrices et de bas-reliefs votifs. Nous allons là à 9 heures du matin ; nous en sortons à 3 heures. Le soir se passe à mettre au net nos notes, ou au théâtre. En nous dépêchant bien, nous en avons encore pour une quinzaine de jours. Restera ensuite le Vésuve, Pompéi et les environs.

Aujourd’hui nous devions aller à Capoue, mais nous nous sommes trompés sur l’heure de départ du chemin de fer (quelle autre baraque !). Il eût été trop tard, nous n’aurions pu rien voir et nous