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CORRESPONDANCE

319. À LOUISE COLET.

Entièrement inédite.

Dimanche. [2 mai.]

Je ne t’ai pas écrit cette semaine tant j’étais harassé. Depuis avant-hier ça va mieux un peu et hier au soir, jour habituel de ma correspondance, comme j’étais en train, j’ai continué jusqu’à 2 heures sans avoir le temps de te dire bonjour.

Je n’ai reçu aucun paquet de toi et n’ai, par conséquent, rien à te renvoyer avec deux Melaenis Bouilhet t’adressera, les accompagnant de toutes sortes d’amitiés. Puisque tu dois lire ta comédie aux Français, je vais t’en dire pratiquement ce que j’en pense. Le Philosophe, sous un transparent clair, y est bafoué. Ne fût-ce que cette terminaison en IN, tout le monde le reconnaîtra, et lui-même surtout s’y reconnaîtra et t’en gardera une rancune éternelle. Tu as tort pour Henriette, pour toi-même d’abord.

Quant à moi, ces messieurs de la Revue et autres, auxquels l’ami n’a pas manqué, ou ne manquera pas de dire la chose, feront des gorges chaudes sur mon compte. Le grand homme futur en aura (ce dont je me moque complètement) ; obscur et absent d’ailleurs, que m’importe ? Il n’y a que sur toi que quelque désagrément en pourra rejaillir. Atténue donc autant que possible toute ressemblance entre Dherbin et le Philosophe. Fais-en un légitimiste, tout ce que tu voudras, au lieu d’un doctrinaire, etc. Réfléchis là-dessus ; je crois le conseil important pour ta vie, pour l’avenir.