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CORRESPONDANCE


et pour dire noblement qu’une femme gravée de la petite vérole ressemble à une écumoire :

D’une vierge par lui (le fléau), j’ai vu le doux visage,
Horrible désormais, nous présenter l’image
De ce meuble vulgaire, en mille endroits percé,
Dont se sert la matrone en son zèle empressé,
Lorsqu’aux bords onctueux de l’argile écumante
Frémit le suc des chairs en sa mousse bouillante.

Voilà de la poésie, ou je ne m’y connais pas, et dans les règles encore !

J’éprouve le besoin de faire encore deux citations.

Une demoiselle parle à sa confidente de ses chagrins d’amour :

Et d’un secours furtif aidant la volupté
Je goûte avec moi-même un bonheur emprunté.

La confidente répond qu’elle connaît cela et ajoute :

et les hommes aussi
Par un moyen semblable apaisent leur souci.

Le lettre de la mère Hugo est très gentille. Je te la renvoie. Elle m’a causé une impression très profonde, et à Bouilhet aussi. Nous connaissons ici un jeune homme qui nourrit pour elle un amour mystique depuis l’exposition de son portrait par L. Boulanger, il y a une douzaine d’années au moins. Se doute-t-elle peu de cela, cette femme qui vit à Paris, qu’il n’a jamais vue, qu’elle n’a jamais vu ? Chaque chose est un infini ; le plus petit caillou arrête la pensée tout comme l’idée de Dieu. Entre deux cœurs qui battent l’un sur l’autre, il y des a abîmes ; le néant est entre eux, toute la vie et le