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CORRESPONDANCE

lement enthousiasmé de ce jeune bourgeois que j’éprouvais tour à tour le besoin de lui faire frapper une médaille en aluminium — et de l’écorcher vif. Franchement, je l’aurais vu écarteler avec ivresse. J’ai tout fait pour savoir son nom ; on a calé, on m’a dit qu’on ne savait plus, etc. Mais, le positif, c’est que ton bouquin a fait rompre un mariage et il est probable qu’en cela il a fait une bonne action ! Est-ce beau ! nom d’un pétard, est-ce beau !

Je ne vais pas si vite que tu penses, mon cher vieux. Mais je commence à voir un peu mes personnages. Je crois qu’ils ne sont plus maintenant à l’état de mannequins, décorés d’un nom quelconque. Pour qu’on dise d’un personnage antique : C’est vrai, il faut qu’il soit doué d’une triple vie, car le modèle, le type, qui l’a vu ? J’espère dans un mois avoir fini mon VIe chapitre et, avant de rentrer à Paris, le VIIe sera fait, il le faut. Je me suis débarrassé du Ve par la suppression de deux morceaux excellents, mais qui ralentissaient le mouvement. J’ai aussi changé l’ordre de deux ou trois paragraphes et je crois qu’à présent ça roule. Bref, ça ne va pas trop mal.

Mais je deviens lubrique, ma parole d’honneur, mon v… m’occupe ou mieux me préoccupe, chose grave ! Est-ce l’été de la Saint-Martin qui approche ? j’en ai peur ! Je fais pour cet hiver des projets féroces ! T’effraierai-je ?

Je vais avoir, pendant deux jours, à trimbaler un jeune auteur anglais, le fils de l’ancien ambassadeur grec à Londres[1]. Puis le Bouilhet m’arrive.

  1. Hamilton Aïdé.