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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Hier soir j’ai vu l’Autre, et j’ai pleuré à diverses reprises. Ça m’a fait du bien. Voilà ! Comme c’est tendre et exaltant ! Quelle jolie œuvre, et comme on aime l’auteur ! Vous m’avez bien manqué. J’avais besoin de vous bécoter comme un petit enfant. Mon cœur oppressé s’est détendu. Merci ; je crois que ça va aller mieux. Il y avait beaucoup de monde. Berton et son fils ont été rappelés deux fois.


1095. À GEORGE SAND.
[Paris] lundi matin, 11 heures [4 avril 1870].

Je sentais qu’il vous était arrivé quelque chose de fâcheux, puisque je venais de vous écrire pour savoir de vos nouvelles, quand on m’a apporté votre lettre de ce matin. J’ai repêché la mienne chez le portier ; en voici une seconde.

Pauvre chère maître ! Comme vous avez dû être inquiète ? et Mme Maurice aussi ! Vous ne me dites pas ce qu’il a eu (Maurice). Dans quelques jours, avant la fin de la semaine, écrivez-moi pour m’affirmer que tout est bien fini. La faute en est, je crois, à l’abominable hiver dont nous sortons. On n’entend parler que de maladies et d’enterrements ! Mon pauvre larbin est toujours à la maison Dubois et je suis navré quand je vais le voir. Voilà deux mois qu’il reste sur son lit, en proie à des souffrances atroces.

Quant à moi, ça va mieux. J’ai lu énormément. Je me suis surmené et me revoilà à peu près sur pattes. L’amas de noir que j’ai au fond du cœur