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CORRESPONDANCE

Quant à Mme de Forges, je l’ai connue en 1837 ! à Trouville. Quelle antiquité. Du reste, mon grand âge m’étonne, vu la quantité de souvenirs qui m’assaillent. Nous sommes maintenant à l’anniversaire des journées de juillet, que je me rappelle parfaitement. C’était un autre monde et si distant de celui d’aujourd’hui, qu’il m’apparaît maintenant non comme une chose vue, mais comme une chose imaginée. Les besoins de mon affreux bouquin font que je me livre à la politique comme si « je visais à la députation » (Dieu m’en garde !). Je suis en plein dans la question du « droit au travail » et autres bêtises de 48.

Il me semble qu’on est un peu moins inepte maintenant.

Dans mes accablements, ma pensée se reporte sur vous et sur Saint-Gratien. Je vous vois dans votre atelier et dans votre parc, entourée des petites chèvres et des intimes… restez vaillante, chère Princesse, pour vous-même et pour nous tous.

Taine m’a écrit ce matin qu’il se sentait très fatigué et ne pouvait plus travailler qu’un jour sur deux. Mais il a coutume de se plaindre et le stoïcisme n’est point son affaire. Je n’ai aucune révélation de Renan ni de Goncourt.

J’étais invité hier à aller à Chenonceaux pour l’inauguration de la statue de P.-L. Courier. Cette « petite fête de famille » ne m’a pas séduit, vu le nombre de reporters qui ont dû l’émailler.

J’aimerais mieux m’en aller chez vous, goûter à la cuisine japonaise, sûr d’avance que je la trouverais exquise.

Cuisine à part, je compte vous faire une petite