Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/639

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avoir lu Lamennais, Saint-Simon, Fourier, Proudhon (Lettre à Mme Roger des Genettes), accompli le voyage de Paris à Montereau (Lettre à Jules Duplan), dont il décrira les paysages dans le premier chapitre de son livre, visité la forêt de Fontainebleau, dont il fait un croquis que nous publions plus loin et qu’il développera lors de la promenade de Frédéric et de Rosanette (p. 465), après s’être assuré des moyens de communication et, en les parcourant, des routes établies à l’époque (Lettre à Jules Duplan), Flaubert commence l’écriture de son roman et, cette fois, c’est sous cette forme qu’il l’annonce à Mlle Leroyer de Chantepie : « Je veux faire l’histoire morale des hommes de ma génération, sentimentale serait plus vrai. C’est un livre d’amour, de passion, mais de passion telle qu’elle peut exister maintenant, c’est-à-dire inactive. » En 1866 et 1807, il étudie la Révolution de 1848 ; il consulte Sainte-Beuve, George Sand, Duruy, Michelet, Armand Barbès (voir Correspondance, III), il annote 27 volumes sur cette époque (Lettre à Louis Bouilhet). Un peu plus tard, en 1868, alors qu’il doit décrire le cérémonial funéraire déployé aux obsèques de M. Dambreuse (p. 544), il quitte Croisset pour Paris : « Je viens de relire mon plan. Tout ce que j’ai encore à écrire m’épouvante, ou plutôt m’écœure à vomir… Je me suis trimballé aux Pompes funèbres, au Père-Lachaise, etc. » (Lettre à George Sand, voir Correspondance, III).

Nous avons trouvé mêlé aux ébauches le plan du champ de courses établi au Champ de Mars. Les notes descriptives qui en couvraient les marges indiquent avec quel scrupule Flaubert tenait à l’exactitude des détails. (Voir, p. 296, la rencontre de Frédéric et de Rosanette avec Mme Arnoux sur le champ de courses.)

Sur 2355 feuillets écrits au recto et au verso, s’étend l’ébauche de l’Éducation sentimentale. Selon son habitude, Flaubert écrit d’esquisse en esquisse, raye de diagonales sa première ébauche et la reprend au verso. C’est d’après ce texte qu’il écrit son manuscrit définitif. L’aspect de ces 2355 feuillets, criblés d’alinéas entiers couverts de larges traits d’encre, de phrases supprimées, de ratures en tous sens, de marges encombrées de notes surchargées, est incomparable. Nous avons cherché en vain à suivre Flaubert dans quelques-uns de ses développements pour en donner ici l’indication, il nous a été impossible de le faire. Nous avons choisi parmi ces ébauches les pages les plus claires pour les reproduire, et elles sont de la dernière reprise. Cependant nous avons pu constater, d’après certains mots ou quelques phrases retranscrites presque intégralement, que le premier chapitre avait été esquissé sept fois et que la description de la forêt de Fontainebleau, qui forme quatre pages du livre, avait donné lieu à des reprises multiples couvrant 72 feuillets ; des pages sont entièrement sacrifiées. « Moi, je travaille furieusement. Je viens de faire une description de la forêt de Fontainebleau qui m’a