Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/366

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dans un tout petit vallon creusé avec un mouvement de cuillère et où il y a une place d’herbe très verte. On monte encore cinq minutes, de la neige à droite ; quand elle sera fondue, il poussera sans doute de l’herbe à la place.

Du haut du Liban, sur la crête aiguë de la montagne, on a à la fois (il ne s’agit que de se retourner) la vue de l’Anti-Liban, de la plaine de la Bequaa, le versant oriental du Liban, d’un côté et de l’autre, celle de la vallée des Cèdres et de la mer, bleue et couverte de brume, au bout de cette gorge teinte d’ardoise avec des traînées rouges et des tons noirs. La vallée part d’en face de vous, par une courbe incline sur la gauche, puis redevient droite et s’abaisse vers la mer. De là-haut, elle a l’air d’une grande tranchée taillée entre les deux montagnes, fossé naturel entre les deux murs géants. Sur son ton, généralement bleu très foncé, places noires ; ce sont des arbres, dans lesquels on distingue des petits dés gris, qui sont des maisons. Aux premiers plans, à droite, mamelons qui descendent vers la vallée, comme des épines dorsales régulières de couleur rose, pâle d’ensemble ; la crête de chacun est presque rouge et graduellement, en descendant vers le fond, va s’apâlissant en gris, pour se marier aux terrains blancs inférieurs. Quelques traînées blanches au milieu des mamelons, entre chacun d’eux ; ce sont les sentiers des ravins à sec. C’est de ce côté que se trouvent les cèdres, verts au milieu du gris qui les entoure. Dans l’ensemble d’un si vaste paysage, ce n’est qu’un détail, je m’attendais à plus d’importance de leur part. Du reste, comme bouquet et imprévu dans la