Page:Flaubert - Notes de voyages, II.djvu/172

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Jeudi 6. — Nous avons pris un guide, qui porte nos deux sacs de nuit, un quatrième cheval avait été pris la veille à Pyrgos pour alléger les autres ; le bagage viendra derrière nous, comme il le pourra, notre intention est d’aller coucher le soir même à Patras.

Nous allons sur la plaine, nue, sans maisons, sans arbres, sans culture, sans habitants et sans voyageurs ; elle est d’un ton blond pâle uni, comme le ciel, qui est blanc gris ; de temps à autre, des glaïeuls ou de grandes herbes minces, desséchées, effilées.

À gauche nous avons la mer. Traversé le Pénée (rivière de Gasturi) en bac, le bateau est à quille et roule sous le sabot de nos chevaux, qui tremblent de peur.

À 10 heures, déjeuner au village de Tragano, chez un épicier grec.

Nous continuons, piquant dans le Nord-Ouest. À notre droite, une montagne de ton bleuâtre foncé, atténué par la brume, et derrière elle, très loin, bien au delà, s’avançant en pointe, une autre se dessinant en blanc, dans le ciel gris pâle : c’est derrière et au pied de celle-là, que se trouve Patras.

La plaine continue, nous trottons ; de temps à autre on s’arrête au pas, pour passer une fondrière pleine d’eau, et le cheval reprend son allure. Pas de culture, personne ; la terre est grasse ; çà et là, quelques arbres, bientôt cela devient presque régulier, ce sont des chênes comme plantés de place en place sur l’herbe (restes d’une forêt disparue ?).

Il y a deux ou trois sentiers parallèles, filant en