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MONOGRAPHIE DE L’ANARCHISTE

Il est encore ligoté dans sa camisole de force que déjà la monomanie de la propagande par la parole en a refait une sorte d’apôtre. Il y a en lui de l’évangéliste et du fou. Dès qu’on lui retire ses liens son geste accentue sa phrase, — un geste nerveux, ample, très rapide. Il essayera de causer anarchie avec M. Atthalin, avec M. Gués, avec Me Henry Robert, avec Me Lagasse. Il faut qu’il prêche !

Cette manie n’est pas propre seulement à l’anarchiste ouvrier, ou « trimardeur ». Les lettrés du parti, avocats, médecins, publicistes, en sont également atteints.

J’en sais un, assez instruit, qui s’est vu successivement fermer les portes de tous les journaux dans lesquels il a essayé de gagner sa vie. À peine installé de huit jours, il signifiait à son rédacteur en chef que le partage des bénéfices dans l’exploitation du journal lui paraissait inégalement distribué, qu’il eût à tenir compte des droits de ses employés, collaborateurs et ouvriers, sous peine de subir immédiatement les effets désastreux d’une grève générale. Invariablement le rédacteur en chef répondait à cette démarche en invitant son interlocuteur à passer à la caisse et à déguerpir sans délai. Le journaliste anarchiste se retirait en proférant de vagues menaces à l’adresse du capital et courait chercher ailleurs un nouveau champ d’expérience où sa manie militante pouvait s’exercer une semaine ou deux. En dernier lieu, il opéra à l’Agence Dalziel, où, n’ayant pu convaincre son directeur, il coalisa