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je ne l’avais pas encore vu ; il n’était pas sorti, parce qu’il fallait faire croire au conte de sa cuisse cassée. Mon oncle, redoutant ma franchise, fit tout ce qu’il put pour m’empêcher de l’aller voir, et il ne voulut m’y accompagner que lorsqu’Escudero s’offrit d’être mon chevalier ; il prévint San-Roman de ma visite, et eut le soin de l’avertir de ne pas s’effaroucher de la liberté de mon langage.

En nous rendant à la maison de Gamio, où était logé San-Roman avec tout son état-major, mon oncle ne cessait de me répéter   : — Florita, je vous en supplie, prenez bien garde à tout ce que vous direz au général, car…

— De quel général parlez-vous donc ?

— Eh bien ! de San-Roman.

— Est-il général, maintenant ! je n’avais pas appris sa nomination.

— Il n’était que colonel ; mais vous sentez qu’après cette victoire il va être nommé général, et la politesse exige…

— Ah ! ah ! mon oncle, je vous en supplie à mon tour, ne me faites pas rire, autrement je ne réponds pas de toutes les folies que je vais débiter à votre général, si habile à la course, qu’il devrait commander à une armée de lièvres.