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sur florian.

Le style de La Fontaine est un autre genre d’étude qui ne se dérobe pas moins aux règles de l’application pratique. La Fontaine arrivait à une époque où notre grammaire était moins arrêtée que jamais, si elle doit l’être jamais. Il affectionnait les formes de l’ancien langage, l’archaïsme pur, l’idiotisme, le patois. Il faisait même des mots à sa guise, avec peu d’égard au Dictionnaire que l’on composait sous ses yeux. Sa langue n’était pas le français du Dictionnaire, c’était le français de La Fontaine, et il est devenu classique dans La Fontaine, en dépit des grammairiens ; mais ce n’est pas tout-à-fait quand on apprend à lire qu’on peut apprécier ces licences du maître qui seraient des fautes graves dans l’écolier. Il ne faut pas lire La Fontaine à côté de la Syntaxe et du Rudiment ; il faut le lire quand on a lu beaucoup ; il faut le relire quand on a tout lu, quand on sait lire au sens moral du mot, c’est-à-dire quand on sait la raison de l’expression comme celle de la pensée.

Florian n’est pas à la hauteur de ce génie merveilleux, mais il est toujours clair, instructif et moral. Il n’a pas donné au langage ce mouvement de vie qui est une espèce de création, mais il est toujours correct et pur. Il est rarement neuf dans les idées, plus rarement neuf dans les formes et dans les acceptions, mais il est toujours aimable et amusant, de bon exemple et de bon conseil. Ses enseignements sont moins élevés, mais ils n’en sont que mieux mesurés à la capacité des intelligences ordinaires. Quand il perd de vue son inimitable modèle, il est encore bon à suivre, parce qu’il ne peut jamais se tromper absolument, ni sur le fond des choses, ni sur la manière de les exprimer ; quand il s’en rapproche, il est exquis.