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livre iii.

Se présente au milieu de nos singes joyeux.
Tout tremble à son aspect. Continuez vos jeux,
Leur dit le léopard, je n’en veux à personne ;
Rassurez-vous, j’ai l’âme bonne ;
Et je viens même ici, comme particulier,
À vos plaisirs m’associer.
Jouons, je suis de la partie.
— Ah ! monseigneur, quelle bonté !
Quoi ! Votre Altesse veut, quittant sa dignité,
Descendre jusqu’à nous ? — Oui, c’est ma fantaisie.
Mon Altesse eut toujours de la philosophie,
Et sait que tous les animaux
Sont égaux.
Jouons donc, mes amis, jouons, je vous en prie.
Les singes enchantés crurent à ce discours,
Comme l’on y croira toujours.
Toute la troupe joviale
Se remet à jouer : l’un d’entre eux tend la main ;
Le léopard frappe, et soudain
On voit couler du sang sous la griffe royale.
Le singe cette fois devina qui frappait ;
Mais il s’en alla sans le dire.
Ses compagnons faisaient semblant de rire,
Et le léopard seul riait.
Bientôt chacun s’excuse et s’échappe à la hâte,
En se disant entre leurs dents :
Ne jouons point avec les grands ;
Le plus doux a toujours des griffes à la patte.