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livre iii.

Et, le bec rempli de pâture,
Il apporte sa nourriture
À l’orpheline qui gémit.
Ô puissant Allah providence adorable !
S’écria le dervis ; plutôt qu’un innocent
Périsse sans secours, tu rends compatissant
Des oiseaux le moins pitoyable !
Et moi, fils du Très-Haut, je chercherais mon pain !
Non, par le prophète j’en jure !
Tranquille désormais, je remets mon destin
À celui qui prend soin de toute la nature.
Cela dit, le dervis, couché tout de son long,
Se met à bayer aux corneilles,
De la création admire les merveilles,
De l’univers l’ordre profond.
Le soir vint ; notre solitaire
Eut un peu d’appétit en faisant sa prière.
Ce n’est rien, disait-il ; mon souper va venir.
Le souper ne vient point. Allons, il faut dormir,
Ce sera pour demain. Le lendemain, l’aurore
Paraît, et point de déjeuner.
Ceci commence à l’étonner ;
Cependant il persiste encore,
Et croit à chaque instant voir venir son dîner.
Personne n’arrivait ; la journée est finie,
Et le dervis à jeun voyait d’un œil d’envie
Ce faucon qui venait toujours
Nourrir sa pupille chérie.