Page:Florian - Fables, illustrations Adam, 1838.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
137
livre iii.

Personne ne venait, hors cinq ou six marmottes,
Ou bien quelques biches dévotes
Qui vivaient loin du bruit, sans entour, sans faveur,
Et ne pouvaient pas mettre en crédit l’orateur.
Il prit le bon parti de changer de matière,
Prêcha contre les ours, les tigres, les lions,
Contre leurs appétits gloutons,
Leur soif, leur rage sanguinaire.
Tout le monde accourut alors à ses sermons ;
Cerfs, gazelles, chevreuils, y trouvaient mille charmes ;
L’auditoire sortait toujours baigné de larmes,
Et le nom du renard devint bientôt fameux.
Un lion, roi de la contrée,
Bonhomme au demeurant, et vieillard fort pieux,
De l’entendre fut curieux.
Le renard fut charmé de faire son entrée
À la cour : il arrive, il prêche, et cette fois,
Se surpassant lui-même, il tonne, il épouvante
Les féroces tyrans des bois,
Peint la faible innocence à leur aspect tremblante,
Implorant chaque jour la justice trop lente
Du maître et du juge des rois.
Les courtisans, surpris de tant de hardiesse,
Se regardaient sans dire rien ;
Car le roi trouvait cela bien.
La nouveauté parfois fait aimer la rudesse.
Au sortir du sermon, le monarque enchanté
Fit venir le renard : Vous avez su me plaire,