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livre iv.

Ce sujet revenait sans cesse en leurs discours.
Tout était en commun, plaisir, chagrin, souffrance ;
Ce qui manquait à l’un l’autre le regrettait ;
Si l’un avait du mal, son ami le sentait ;
Si d’un bien au contraire il goûtait l’espérance,
Tous deux en jouissaient d’avance.
Tel était leur destin, lorsqu’un jour, jour affreux !
Le lapin, pour dîner venant chez la sarcelle,
Ne la retrouve plus : inquiet, il l’appelle ;
Personne ne répond à ses cris douloureux.
Le lapin, de frayeur l’âme toute saisie,
Va, vient, fait mille tours, cherche dans les roseaux,
S’incline par-dessus les flots,
Et voudrait s’y plonger pour trouver son amie.
Hélas ! s’écriait-il, m’entends-tu ? réponds-moi,
Ma sœur, ma compagne chérie,
Ne prolonge pas mon effroi :
Encor quelques moments, c’en est fait de ma vie :
J’aime mieux expirer que de trembler pour toi.
Disant ces mots, il court, il pleure,
Et, s’avançant le long de l’eau,
Arrive enfin près du château
Où le seigneur du lieu demeure.
Là, notre désolé lapin
Se trouve au milieu d’un parterre
Et voit une grande volière
Où mille oiseaux divers volaient sur un bassin.
L’amitié donne du courage.