Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
cviii
M. DE FONTANES


« Viens… » Il se tait, elle hésite,
Il la presse avec ardeur :
Au Dieu qui la sollicite
Elle oppose la pudeur.

Un nuage l’environne
Et la cache à tous les yeux :
De fleurs l’Ida se couronne,
Junon cède un roi des Dieux !

Leurs caresses s’entendirent,
L’écho ne fut pas discret :
Tous les antres les redirent
Aux nymphes de la forêt.

Soudain, pleurant leur outrage,
Elles vont d’un air confus,
S’ensevelir sous l’ombrage
De leurs bois la plus touffus.


La galanterie spirituelle et vive de Parny, et sa mythologie de Cythère, n’avaient guère accoutumé la muse légère du xviiie siècle à cette plénitude de ton, à cette richesse d’accent. Au sein d’un zéphyr qui semblait sortir d’une toile de Watteau, on sent tout d’un coup une bouffée d’Homère :

De fleurs l’Ida se couronne,
Junon cède au roi des Dieux !


Fontanes avait aussi ses retours d’Hésiode:il vient de peindre la Vénus-Junon ; il n’a pas moins rendu, dans un sentiment bien richement antique, la Vénus-Cérès, si l’on peut ainsi la nommer; c’est au huitième chant de la Grèce sauvée :

Salut ! Cérès, salut ! tu nous donnas des lois ;
Nos arts sont les bienfaits:ton céleste génie
Arracha nos aïeux au gland de Chaonie;
Et la Religion, fille des Immortels,