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ŒUVRES DE FONTANES.

Que de ses plus beaux dons la nature dispose ;
Elle nous accorda Philomèle et la rose.

 Du solitaire enclos par le sage habité
La première parure est la fertilité ;
Avant de plaire aux yeux, il faut qu’il vous nourrisse.
Irez-vois, de l’usage écoutant le caprice,
Bannir loin du regard, par d’injustes dédains,
Les dons du potager, vrai luxe des jardins ?
Le bon Alcinoüs en gémirait sans doute.
Un héros que Pallas conduisait dans sa route
Et dont la Grèce entière écoutait le conseil,
Ce voyageur qu’aima la fille du soleil,
Ulysse, est ébloui par la pompe soudaine
De quatre arpents féconds qu’arrose me fontaine.
Ô jours du premier âge ! ô vénérables mœurs !

 Osez-donc, en dépit de nos fausses grandeurs,
Du potager modeste anoblir la roture.
Le riche, dédaignant une utile culture,
N’a que les vains plaisirs de l’orgueil satisfait ;
Ah ! le jardin du pauvre est seul riche en effet.

Quand sur l’aride sein des plaines déjà nues
L’automne redescend, couvert d’épaisses nues,
Et de ses noirs brouillards verse l’humidité
Au sol qu’avaient durci les chaleurs de l’été,
Jardinier, hâte-toi : la terre complaisante
Alors s’ouvre sans peine à la bêche pesante :