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ŒUVRES DE FONTANES.

« De blancs tissus de fin ornent ma couche antique ;
« L’aimable propreté vous dresse en cet instant
« Deux lits, où dans ses bras le sommeil vous attend.
« Vos yeux même aimeront ma table hospitalière,
« Et l’argent ciselé dont reluit ma salière ;
« D’une grappe à l’entour pend le fruit précieux :
« C’est un don de ma femme ; elle-même en ces lieux
« L’apporta de Paris, et, d’une main fidèle,
« Toujours à mon départ l’y reporte avec elle.
« Voyez-vous sur deux rangs s’aligner ces ormeaux
« Dont le midi jamais n’a percé les rameaux ?
« C’est à ma femme aussi que je dois cet ombrage ;
« Quand j’y respire en paix, je bénis son ouvrage ;
« Elle a fait ce beau lieu d’un champ presque désert,
« Que de maigres épis autrefois ont couvert.
« Là, je viens dès l’aurore, et seul, d’un pas tranquille
« Je m’égare en lisant ou Flaccus ou Virgile ;
« De vers, d’aimables riens, doucement occupé,
« Tout bas, je dis aux rois : Votre accueil m’a trompé.
« Le jour fuit, et du soir le banquet me rappelle ;
« Je prie, et dors en paix jusqu’à l’aube nouvelle.
« Ne cherchez point ici des sources, des ruisseaux :
« Un puits est tout mon bien ; si les Nymphes des eaux ;
« Accordaient à mes vœux une claire fontaine,
« Si des prés, si des bois accroissaient mon domaine
« Voudrais-je, environné de tableaux si touchants,
« Pour tous les biens du Louvre abandonner mes champs ?

 Tel jadis L’Hopital a chanté la retraite.
Toi qui fus magistrat, orateur et poëte,