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LA GRÈCE SAUVÉE.

A caché d’un seul coup son glaive tout entier.
Tigrane pousse un cri, tombe et couvre le sable.
Il est vaincu : son front n’est pas moins redoutable ;
Le Dieu qu’il invoqua possède encor ses sens,
Et prête plus de rage à ses derniers accents.
Tigrane, tout rempli du monstre qui l’inspire,
Nous brave, et, dans ces mots, ose encor nous maudire :

 « Tremble, Léonidas, crains l’enfer indigné :
« Ce bord, teint de mon sang, du tien sera baigné ;
« Ta tombe couvrira le lieu de ta victoire ;
« Un Dieu hait vos vertus, vos muses, votre gloire :
« On l’appelle Arimane ; il est le Dieu du mal.
« Ô Grecs ! vous connaîtrez son ascendant fatal.
« Des Dieux même adorés jusqu’en votre patrie
« Contre vous d’Arimane aideront la furie.
« Grecs ! vous le reverrez : il ne tardera pas ;
« Je meurs content : sa main doit venger mon trépas. »
L’Hircanien se tait, ferme les yeux, expire,
Et sur son front encor la menace respire.
Nos vœux ont repoussé, contre sa nation,
De l’ennemi mourant la malédiction.
Nous invoquons Hercule, et Pallas, et leur père ;
Les mots sacrés, l’encens, les feux, l’eau salutaire,
Épurent l’air souillé par l’esprit infernal.
Les soldats, à genoux, comme leur général,
De leur triomphe aux Dieux ont rendu grâce ensemble ;
Et le banquet du soir dans le camp nous rassemble.
Mégistias, prenant son luth harmonieux,
Dit les Titans vaincus par le Maître des Dieux ;