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DE LA SICILE.

point de le ravager. Un peuple insouciant habite et chérit cette contrée merveilleuse ; il danse au bruit de la foudre du volcan, s’endort dans les douces langueurs de l’amour, et place le berceau de ses enfans sur la cendre encore brûlante qui ensevelit le toit de ses pères.

Je me retrouvai à Catane avec un sentiment de bien-être d’autant plus vif, que, pendant cette course pénible, j’avais toujours vu souffrir autour de moi. Ceux qui habitent à la base de l’Etna, manquent d’eau ; une population entière va en chercher fort loin, et de très-mauvaise : des femmes noircies, brûlées par le soleil, maigries par le travail et des privations de tout genre, marchent les pieds nus, portant une grande cruche sur leur tête ; on en rencontre ainsi de longues files qui suivent des chemins creusés dans la lave et encombrés de pierres roulantes ou aiguës. Une profonde tristesse est peinte sur leurs visages ; la veille elles ont souffert, et le lendemain ramenera encore les mêmes besoins, les mêmes difficultés, la même incertitude de pouvoir rapporter quelques gouttes d’eau jusqu’à leurs demeures.

Touché de ce tableau, je me reprochais le